Lundi 18 mars 2019, Pascale Cornut St Pierre a reçu le Prix Carbonnier 2018. La Mission de recherche Droit et Justice a interviewé la lauréate spécialement venue du Québec pour la cérémonie qui s’est déroulée au Conseil d’État. Interview.
Laetitia L-H : Que représente pour vous le Prix Carbonnier ?
Pascale Cornut St Pierre : Pour moi, le Prix Carbonnier est la plus haute distinction que peut recevoir une thèse qui aborde le droit comme une science sociale. Je crois que c’est une idée que Jean Carbonnier a contribué à introduire dans les facultés de droit, à une époque où l’interdisciplinarité n’avait pas encore la cote. Je suis également très fière de recevoir ce Prix car il s’agit d’une reconnaissance des plus hautes instances du monde juridique français, et je suis d’autant plus fière que je ne suis pas française moi-même, je suis québécoise. Je crois que je suis sans doute la première iQuébecoise, mais peut-être aussi la première étrangère à recevoir ce Prix et j’y vois une reconnaissance d’une autre façon d’aborder le droit. En effet, ma première formation n’est pas française, j’ai fait ma thèse en France mais ma façon d’aborder le droit doit beaucoup à mon parcours antérieur qui est au Québec : je suis très fière que les institutions françaises reconnaissent ça.
Laetitia L-H : Quelles opportunités ce Prix prestigieux va t’il pouvoir vous apporter ?
Pascale Cornut St Pierre : C’est un prix qui donne beaucoup de visibilité à un travail qui pose des méthodes pour étudier d’un point de vue sociologique les phénomènes juridiques du monde des affaires. En faisant ma thèse, je n’avais pas nécessairement beaucoup de modèles, donc c’était assez difficile. Si mon Prix peut donner de la visibilité à ce travail pour pouvoir guider d’autres jeunes chercheurs, je serai très heureuse de les encourager à poursuivre dans cette voie.
Laetitia L-H : Quels sont vos futurs projets professionnels ?
Pascale Cornut St Pierre : Depuis maintenant deux ans, je suis professeur à la faculté de droit de l’Université d’Ottawa, où j’enseigne principalement le droit de l’entreprise, la sociologie du droit et le droit financier. Je compte poursuivre cette activité.
Laetitia L-H : Pensez-vous prolonger vos travaux sur ces thématiques ?
Pascale Cornut St Pierre : Cela fait plusieurs années que je travaille sur les swaps et je finalise actuellement ce volet de ma recherche. Je prépare encore un ou deux articles en anglais pour diffuser les mêmes idées, mais cette fois dans le monde anglophone. Je viens aussi de publier ma thèse en français sous forme de livre, qui est paru aux Presses de Science Po en janvier dernier.
Mon prochain projet de recherche portera sur la finance verte. Je souhaite reprendre les mêmes thématiques que dans ma thèse – comment est-ce que l’industrie financière peut faire évoluer le droit par des pratiques contractuelles, par des standards de l’industrie, etc. ? – mais cette fois sur des enjeux plus actuels, en train de se faire, donc beaucoup plus contemporains. Je souhaite étudier comment l’industrie financière prétend se positionner comme un acteur qui contribue à la lutte contre le changement climatique et à la sauvegarde de l’environnement. Ce sujet est bien d’actualité et, comparé aux swaps qui intimident beaucoup les lecteurs potentiels, c’est un objet où la dimension d’intérêt public est bien plus évidente et qui me permettra de toucher un plus vaste public. Et qui sait, peut-être influencer le droit qui est en train de se faire ?
Retrouvez :
– Le discours du Président du jury du Prix Carbonnier, Jean-Denis Combrexelle, Président de la section du contentieux du Conseil d’État
– Le discours de Pascale Cornut St Pierre
Les photos de la cérémonie